
Le navire humanitaire Madleen, affrété par la Freedom Flotilla Coalition pour tenter de briser le blocus de Gaza, a été violemment intercepté lundi 9 juin en haute mer par les forces israéliennes. L’opération, menée loin des eaux territoriales israéliennes, a conduit à l’arrestation des douze passagers du bateau, parmi lesquels la militante suédoise Greta Thunberg, l’eurodéputée française d’origine palestinienne Rima Hassan, ainsi que des journalistes, médecins et défenseurs des droits humains venus de plusieurs pays.
Transférés vers un centre de rétention à l’aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv, plusieurs militants ont été expulsés sous la contrainte dans les heures qui ont suivi. Les autorités israéliennes ont exigé des détenus qu’ils signent des documents d’expulsion reconnaissant leur ‘’entrée illégale’’ sur le territoire israélien, une démarche catégoriquement refusée par plusieurs d’entre eux. « Nous avons été kidnappés dans les eaux internationales », a rappelé Greta Thunberg à son retour à Paris, dénonçant une « violation flagrante du droit international et un acte de piraterie d’État ».
« Une opération illégale pour étouffer la solidarité »
Les organisations de défense des droits humains, les avocats des détenus et plusieurs diplomaties européennes contestent la légalité de cette interception en haute mer. « Ce n’est pas un simple contrôle de frontière, c’est une tentative de criminaliser la solidarité et d’empêcher que le blocus inhumain de Gaza soit rompu », souligne un membre de la coalition de la flottille.
Le journaliste franco-algérien Omar Faiad, également expulsé, décrit des conditions de détention humiliantes : fouilles corporelles, mises en scène photographiques, et diffusion forcée d’images des attaques du 7 octobre. « Cette manipulation vise à diaboliser toute initiative en faveur des Palestiniens », déclare-t-il.
« Chaque jour, nous mourons un peu plus »
Au cœur de Gaza, la pêcheuse Madleen Kulab suivait le périple du navire qui portait son prénom. Depuis des années, la jeune femme symbolise la résilience de cette population assiégée. « J’espérais que le Madleen atteindrait enfin Gaza. Mais ici, nous sommes enfermés sous ce blocus comme dans une immense prison à ciel ouvert depuis plus de 17 ans », confie-t-elle.
Depuis l’agression israélienne du 7 octobre 2023, la catastrophe humanitaire s’est transformée en cauchemar absolu. Selon les chiffres du ministère de la Santé de Gaza, plus de 54 800 Palestiniens ont été tués, et plus de 126 000 blessés. La famine frappe désormais l’ensemble de la bande de Gaza, aggravée par la destruction systématique des infrastructures civiles, des hôpitaux, des écoles et des réseaux d’eau potable.
« Chaque jour devient plus insoutenable. Nous mourons lentement sous les bombes, la faim et l’indifférence », résume Madleen Kulab.
Silence occidental, complicité arabe
Face à cette tragédie, la communauté internationale reste largement spectatrice. Malgré les avertissements lancés par l’ONU, l’OMS, l’UNICEF, et la Cour internationale de justice, Israël poursuit ses opérations militaires sans être freiné. Les appels aux cessez-le-feu restent lettre morte.
Dans les capitales occidentales, les condamnations verbales se succèdent, sans sanctions concrètes. Les États-Unis continuent d’armer Israël, l’Union européenne peine à parler d’une seule voix, tandis que plusieurs régimes autoritaires arabes, alliés de Washington, observent un silence gêné. « Ce qui m’effraie le plus, c’est l’absolue complicité des puissances occidentales et des États arabes qui trahissent la Palestine », accuse Greta Thunberg, depuis Stockholm.
Mobilisations populaires face à l’impuissance des États
En France et dans plusieurs pays européens, les arrestations de la flottille ont déclenché de nouvelles manifestations. À Paris, des rassemblements ont eu lieu place de la République, au Parlement européen et devant l’Élysée. Les slogans fustigent non seulement Israël, mais aussi les dirigeants occidentaux accusés d’hypocrisie et d’inaction : « Israël assassin, Macron complice », « Enfants de Gaza, enfants de Palestine, c’est l’humanité qu’on assassine ».
À Bruxelles, des eurodéputés réclament une suspension immédiate de l’accord d’association UE-Israël, tandis que des ONG appellent à des enquêtes pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Mais l’impunité continue de prévaloir.
Un cri dans le désert
Pour Madleen Kulab, la mobilisation internationale est vitale mais trop éphémère. « Nous sommes devenus une vague médiatique : elle monte un instant, puis retombe. Et nous restons ici, seuls, à subir l’enfer », dit-elle.
Alors que les convois humanitaires peinent à pénétrer dans l’enclave, les Gazaouis affrontent une famine généralisée. Plusieurs distributions alimentaires ont été marquées par des tirs mortels de l’agression israélienne et de sociétés de sécurité privées américaines, visant des civils affamés.
« Ce n’est plus une guerre, c’est un effacement organisé de notre peuple, sous le regard passif du monde entier », conclut Kulab.
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