
Une marche pacifique violemment interrompue
La tentative des militants internationaux de rejoindre Gaza dans le cadre de la Marche mondiale pour Gaza a été stoppée avec une extrême brutalité vendredi soir en Égypte. Parmi les participants figuraient des Suisses, des Français et des militants venus de plusieurs pays. Leur parcours s’est violemment interrompu sur la route d’Ismaïlia, à une centaine de kilomètres du Caire, première étape avant d’atteindre Rafah, aux portes de la bande de Gaza.
« Il y a d’abord eu les forces de sécurité, puis des baltaguias (milices pro-régime souvent utilisées pour réprimer les manifestations) qui sont apparus soudainement et ont déchaîné une violence inouïe », témoigne Zoubir S., un manifestant venu d’Allès (France), visiblement encore choqué par les événements.
Des centaines de militants bloqués et maltraités
Malgré son caractère pacifique et humanitaire, la marche n’avait pas reçu d’autorisation des autorités égyptiennes. Celles-ci ont invoqué, pour justifier l’interdiction, des « craintes d’infiltration par des groupes islamistes radicaux » et des « risques sécuritaires » liés à la présence massive de militants étrangers. Un impressionnant dispositif de sécurité a donc été déployé pour empêcher les manifestants de poursuivre leur chemin.
Selon les organisateurs du collectif Global March, plus d’un millier d’activistes pro-palestiniens ont été bloqués aux abords du Caire pendant plusieurs heures. Sur les 4000 participants espérés, seule une partie a pu rejoindre les points de rassemblement avant d’être dispersée. Certains ont été relâchés, d’autres sont toujours retenus par les forces de l’ordre.
Des vidéos largement relayées sur les réseaux sociaux montrent des scènes d’une rare violence : manifestants molestés, passeports confisqués, téléphones saisis, et militants embarqués de force dans des bus sous escorte policière.
Violences physiques et confiscations
Zoubir S. décrit avec précision la séquence de violence à laquelle il a été confronté : « Les baltaguias ont d’abord commencé par des bousculades et des jets de projectiles. Puis les policiers et militaires sont intervenus, attrapant certains d’entre nous avec une extrême brutalité. Une fois à terre, j’ai été tabassé, ils ont tenté de m’arracher mon téléphone et mon passeport ». Aujourd’hui, il confie ressentir « des douleurs partout » et s’inquiète pour les nombreux participants profondément choqués et psychologiquement éprouvés par cette violence inattendue.
« Beaucoup n’étaient pas préparés à une telle brutalité et sont aujourd’hui traumatisés. Certains n’ont toujours pas donné de nouvelles », déplore-t-il.
Des journalistes aussi ciblés
Les journalistes internationaux, présents pour documenter la marche, n’ont pas été épargnés. Des reporters européens, algériens et suisses ont été contraints d’effacer leurs images et vidéos sous la contrainte des forces de sécurité.
Une humanitaire suisse, présente sur place, raconte également son calvaire : « Nous avons été placés dans un bus et avons attendu des heures. Lorsque le nom de ma collègue journaliste suisse a été appelé, son passeport lui a été rendu, puis elle a été isolée. Je n’ai plus eu de nouvelles à partir de ce moment-là ». Plus tard, elle apprendra que la journaliste avait été expulsée vers la Suisse par le premier vol disponible.
Un échec amer
Au-delà de la violence physique, c’est surtout la frustration d’avoir échoué à briser le blocus de Gaza qui domine chez les participants. « Je suis déçu. Le blocus reste en place. L’aide humanitaire ne parvient toujours pas à entrer », conclut amèrement Zoubir S.
Cette répression brutale met en lumière la fermeté des autorités égyptiennes à verrouiller tout mouvement de solidarité vers Gaza. Derrière les justifications sécuritaires avancées, c’est un verrou diplomatique, politique et géopolitique qui s’impose, empêchant toute tentative d’acheminement d’aide humanitaire vers la bande de Gaza, toujours asphyxiée sous le blocus.
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